mardi, février 13, 2007

épisode suivant

Quand Paul passa devant le bureau de sa secrétaire, cette dernière lui lança un regard surpris, aussitôt teinté d’inquiétude. Il devait passer la journée au tribunal, si il rentrait maintenant, c’est que les choses avaient mal tourné et donc…Il devina ses pensées et la rassura. « au fait, ajouta-t-il avant de refermer la porte continuer à prendre mes messages. Je vais en profiter pour avancer des dossiers ».
Il ôta sa veste, s’assit en desserrant sa cravate, et discrètement retira sa chaussure gauche sous le bureau. Cet accoutrement lui pesait. Il portait son costume de directeur comme un déguisement obligatoire. Lui, son univers, c’était la terre. Se lever tôt, enfiler des bottes, parcourir les champs encore humides de rosée, regarder le soleil se lever au dessus des mas , barboter quelques petits violets dans le champ du voisin, traîner sous le hangar aux machines, respirer avec délectation l’odeur de diesel et de cambouis des tracteurs. En tant que petit dernier, il n’avait pas eu le choix. L’exploitation familiale avait été attribuée à son frère. Lui, il était doué pour jongler avec les équations. Maintenant, il négociait avec les syndicats, les administrations, entouré de juristes, assailli par les journalistes. Il tremblait chaque jour de voir son visage aux actualités. Chaque phrase qu’il prononçait était de toute façon découpée pour lui faire dire le contraire de ce qu’il souhaitait. Il était éreinté. Dans dix ans, ça irait mieux. Dix ans. Pour les enfants. Pour Eléonore. Et puis, parce que c’était comme ça. Il avait pris un chemin. C’était son devoir de le suivre.
Il décrocha son téléphone. « Marie, s’il vous plait, appelez l’agence et réservez un vol pour Paris vers 21h, ainsi qu’une chambre dans un hôtel de l’aéroport et une voiture pour la journée de demain. Au nom de ma femme. Vous faites établir la facture à mon nom. Vous m’appellerez quand le coursier sera là, j’ai mon chéquier ».
Puis il envoya un message à Eléonore. « je t’ai pris un billet pour ce soir –prévois une baby sitter pour demain après l’école ». Il savait que si il l’appelait, elle discuterait, tergiverserait, et ça, il en avait horreur. Il savait aussi qu’il lui rendait service en lui forçant la main. Puis il se plongea enfin dans ses paperasses.

Le suspens est à son comble: tout le monde se demande si Paul a une loveaffair avec sa secrétaire. Evidemment. Ce qui expliquerait l'anéantissement d'Eléonore; Ben, non. Paul, c'est pas son genre. Déjà, sa religion lui interdit (tu ne convoiteras pas...alors, pensez-donc, passer à l'acte!) Et puis surtout, il est dans le secret-défense. Doit donc faire montre d'une moralité à toute épreuve. Or chacun sait que les secrétaires sont bien souvent des taupes des RG. En plus, il la soupçonne d'être syndiquée. Secrètement.

Aucun commentaire: